De son héritage issu de la distillation clandestine à son humble contribution à des blends tels que Chivas ou Famous Grouse, découvrons comment la notoriété de ce monument du Speyside s'est forgée à travers vents et marées.

Partons ensemble découvrir l'histoire de The Glenrothes.

Allez viens boire un p'tit coup à Rothes !

Ce qui ne tue pas...

En premier lieu la distillerie Glenrothes peut se prévaloir d'une longue histoire et d'une longue tradition. Une histoire qui daterait vraisemblablement du XVIIIe siècle, à une époque où les distilleries clandestines opéraient à l'abri des regards dans la sinueuse et vallonnée région du Speyside.

Lorsqu'en 1823 la réglementation sur la distillation s'assouplie, de nombreux distillateurs pouvaient enfin officier légalement. On retrouve par exemple en 1840 les premières traces de la distillation par Glen Grant à Rothes, dans le Morashire. Mais il semble que leur volonté de se tenir à l'écart des villes persistait, à en croire l'emplacement atypique de ce qui allait devenir The Glenrothes…

James Stuart, le cofondateur de Glenrothes (et propriétaire de The Macallan dès 1868), décida d'installer la distillerie Glenrothes en 1878... sur les vestiges d'un ancien cimetière, à l'extérieur de la ville de Rothes.

Mais avant même que la première goutte d'eau-de-vie ne soit produite, la distillerie annonçait être déjà au bord de la faillite à cause de la banqueroute de la Glasgow Bank. Par chance l'Église presbytérienne de Knockando (qui n'était pourtant pas porté sur l'alcool) décida de venir en aide aux investisseurs. Pour eux cette opportunité de nouvelle entreprise allait offrir de nombreux emplois à la région.

La production commença enfin le 28 décembre 1879, le jour où le pont Tay s'effondra près de Dundee (75 morts). Cela fait du 28 décembre 1879 une date historique, pour le pont comme pour la distillerie.

La tragédie ferroviaire du pont sur le Tay, le 28 décembre 1879

En 1887, la distillerie change de propriétaire. Ils tombent entre les mains des Highland Distillers, qui encouragent l'augmentation de la production. D'ailleurs, bien qu'elle appartienne aujourd'hui au groupe Edrington, la distillerie Glenrothes est toujours membre du Highland Distillers Group Ltd.

… essayera quand même de vous tuer !

La distillerie fut fermée pendant la Première Guerre mondiale, mais la production reprit en 1920, malgré l'interdiction américaine. Tout se déroulait (enfin) comme prévu lorsqu'un incendie détruisit un entrepôt contenant plus de 2 500 fûts remplis de délicieux Glenrothes.

C'était le 15 mai 1922. Le whisky en feu se déversa alors dans le Burn of Rothes, une rivière qui traverse le centre de la ville.

La distillerie The Glenrothes, sur les bords du Burn of Rothes

Comme toutes les distilleries, la distillerie Glenrothes est en proie aux problèmes causés par la Prohibition aux USA. En 1933, plusieurs distilleries écossaises fusionnent, dont la distillerie Glenrothes. La production reprit à l’automne de la même année suite à la levée de la Prohibition aux États-Unis.

La distillerie a mis du temps à se remettre de ses pertes et n'a lancé la désormais rarissime série de whisky Saladin Boxes qu'en 1950. L'orge maltée était alors fournie par la distillerie sœur Tamdhu. Cette dernière eut également appartenu au groupe Edrington.

Au cours des années suivantes, la distillerie fut agrandie et modernisée, de sorte qu'en 1982 les premières discussions commencèrent avec Christopher Berry Green, directeur de Berry Bros., et John Goodwin de Highland Distillers, concernant la commercialisation du whisky via Berry Bros.

Après avoir rénové en 1989 la Rothes House, un ancien presbytère, ils se lancent dans la commercialisation du Cutty Sark Whisky. Celui-ci porte le nom d'un important navire. Il est produit par The Glenrothes.

The Glenrothes, humble et délicieux

Ce n'est qu'assez récemment que le whisky Glenrothes arrêta de concentrer la majorité de sa production à l'élaboration des blends, à l'image de Cutty Sark, Famous Grouse et Chivas. Produire un whisky qui a pour vocation première l'assemblage montre la grande humilité de la marque, malgré l'immense qualité que tous les amateurs connaissent et plébiscitent.

Aujourd'hui, son ADN évoque sans détour la patte Edrington. Ce groupe est en effet un inconditionnel amateur de fûts de Xérès pour l'élevage de ses scotchs, notamment de The Macallan.

Le premier whisky millésimé date de 1979, et n'est arrivé sur le marché qu'en 1994. Mais une production élevée entraîna une réduction des volumes distillés en 2000. Durant cette période, les employés travailleront six mois pour Glenrothes et six mois pour Tamdhu, de sorte qu'aucun licenciement ne soit nécessaire.

La production n'a redémarré à plein régime qu'en 2004. La distillerie produit son excellent whisky à partir de l'eau des sources d'Ardcanny et de Brucehill. L'une des attractions les plus connues reste sans doute leurs 12 cuves de brassage en pin d'Oregon, dont la qualité d'entretien force le respect.

La production n'a pas changé depuis plus de 130 ans - elle est devenue plus moderne, bien sûr - mais le soin et le dévouement apportés à ce merveilleux scotch sont toujours là aujourd'hui.

“Chose acquise à suée est plus chérie qu'héritée.”

L'histoire de The Glenrothes en est la preuve absolue.